L'Apprentissage en Questions


NON A L’ALTERNANCE / APPRENTISSAGE !

 

DIRE VRAI AU SUJET DE L’APPRENTISSAGE.

 

   Quand l’économie et l’emploi vont bien, on ne se pose pas la question de la formation. Mais quand les difficultés apparaissent, un discours habituel resurgit : « C’est de la faute à la formation ! ».

   Quelle fumisterie ! Vous savez bien que ce n’est pas vrai ! S’il n’y a pas d’embauche, qualifié(e) ou pas, on ne trouve pas d’emploi.

   Et aussitôt, comme l’on fait de très nombreux gouvernements successifs, la phrase mythique réapparaît : « Il faut accroître le nombre d’apprentis pour le porter à 500 000 ! ».

   Une fois encore nous allons dire la vérité des chiffres et des faits pour tordre le cou aux idées fausses qui circulent, et exposer des réalités qui dérangent.

 

   Puisque vous êtes nombreuses et nombreux à appeler pour qu’un argumentaire soit diffusé contre l’introduction de sections d’apprentissage/alternance en Lycée Professionnel, nous nous faisons un réel plaisir (laïque) de vous communiquer ce que vous attendiez.

   Faites en le meilleur usage ! Diffusez le ! Adressez nous vos bonnes idées contre ce danger qui menace les LP et nos statuts.




 

Question : Il paraît qu’ « Il faut développer l’apprentissage pour aider les jeunes en difficulté » ?

Réponse : Première affirmation fausse :

  • Il y avait 192 063 apprentis au niveau CAP en 1997/1998, ils sont 176 087 en 2002/2003 ; c’est la preuve que le patronat s’adresse de moins en moins à ces jeunes.
  • Il y avait 16 770 apprentis niveau BTS en 1996/1997, ils sont 29 639 en 2002/2003. Il y avait 9 539 apprentis niveau II et I en 96/97, ils sont 26 869 en 2002/2003 : sans commentaire !

 

Q : On nous dit : « On va prendre une section d’apprentis pour permettre à des élèves qui ont échoué leur diplôme de le réussir ». N’est-ce pas bien ?

R : NON ! En soi, on ne peut que souhaiter la réussite de tous les jeunes ! Mais dans ce cas on propose un remède pire que le mal. En effet, nous savons que c’est plutôt dans les parties générales et théoriques que les jeunes ont « échoué ». Ce n’est donc pas en les versant dans des versions « light » en enseignement général et théorique qu’on les conduira à la réussite. Là encore, c’est une recherche d’économie qui dirige : l’administration refuse de leur permettre de « doubler » pour réussir leur diplôme car tous les autres palliatifs coûtent moins cher à l’Education Nationale qui n’a plus à financer ces systèmes !

 

Q : Il paraît que : « L’apprentissage, c’est pour tous les jeunes ».

R : Encore faux. Par exemple, la discrimination par le sexe est réelle.

  • Au niveau V les apprenties ne représentent que 5,7% des métiers de la production qui représentent les trois quarts des contrats. Et globalement au niveau V, 25,4% d’apprenties.
  • Ce même déséquilibre existe au niveau IV et III. Même au niveau I, 23,8% sont des apprenties. Moins du tiers d’apprenties : il y a discrimination.

 

Q : Pour des jeunes en difficulté, qui ont des problèmes de comportement, qui ne viennent pas tous les jours en cours, vous ne pensez pas qu’ils seraient mieux en apprentissage ?

R : NON ! L’entreprise rédemptrice, pacificatrice, soignant les problèmes économiques et sociaux n’est qu’un mythe ! Le bon patron social, une exception ! L’entreprise ne va pas signer un contrat pour se créer un problème ! Et si le contrat est rompu en cours de cycle (et c’est hélas le cas : 25% d’abandons au cours des 3 premiers mois tant de la part de l’apprenti(e) que du patron révèle le malaise certain et la dure réalité de l’apprentissage), alors le jeune va commencer la galère de l’exclusion sans formation ni qualification. NON ! Ce n’est pas une solution. Et en plus on sait bien que l’entreprise a toujours pratiqué le tri sélectif parmi les jeunes.

 

Q : On dit que l’apprentissage serait bon pour certains jeunes ? N’est-ce pas vrai ?

R : Quand ils n’ont pas d’autre choix puisque les places en LP manquent, c’est de fait !

Si on vous posait cette même question pour vos propres enfants vous répondriez férocement NON ! Alors par quel miracle ce serait bon pour les enfants des autres ? Si vous êtes convaincu(e) du rôle avant tout civique, éducatif, formateur et qualifiant de l’entreprise et si vous pensez que la rue est l’école de la vie vous êtes un adepte d’Ivan Illich qui pensait : « il faut fermer l’école ». Nous vous croyons plus sérieux.

 

Q : On nous dit que : « L’apprentissage/alternance favorise la réussite des jeunes ». Est-ce vrai ?

R : NON ! Qui peut croire à ce miracle pédagogique ? Comparons : un(e) apprenti(e) va aller le quart du temps en CFA en 2 ans, un(e) élève de LP va être trois quarts en cours au LP en 2 ans. Qui oserait soutenir qu’une moindre formation générale, théorique, pratique… « favorise la réussite » ? Non sens ! D’ailleurs les chiffres ne mentent pas. Le nombre d’élèves de LP qui continuent en Bac Pro après un BEP, voire après un Bac Pro dans une formation supérieure, existe réellement. Le faible nombre d’apprentis qui poursuivent après un diplôme préparé en alternance/apprentissage prouve bien que ce n’est pas une voie qui « favorise la réussite ».

 Et j’ajouterai, l’école a le souci de former l’homme, le citoyen, le travailleur alors que l’apprentissage/alternance formate un outil !

 

Q : Un chef d’établissement peut-il imposer un CFA dans l’établissement ?

R : NON, il faut un avis de la commission permanente et un vote du Conseil d’Administration. Si le CA vote NON en majorité, cela ne pourra pas se faire. Donc, votez NON et surtout faites voter NON.

 

Q : Pourquoi un chef d’établissement peut-il vouloir un CFA dans le LP ?

R : Soit parce qu’il est favorable à l’alternance/apprentissage, soit surtout parce qu’il voit d’un bon œil une indemnité financière intéressante pour lui, soit parce qu’il voit un moyen de diviser les personnels en distribuant des HS ou indemnités, soit parce qu’en zélé fonctionnaire d’autorité il obéit aisément aux ordres de sa hiérarchie.

 

Q : On nous dit : « Comme il y a baisse de recrutement, il faut accepter le CFA, comme ça on recrutera ». Est-ce vrai ?

R : NON. L’apprentissage n’a jamais fait naître plus d’enfants. Et en plus, s’il y a des apprentis payés dans le LP et des élèves non payés en BEP ou Bac Pro, l’argument économique peut attirer les jeunes et les sections initiales peuvent se vider !

 

Q : On nous dit : « Si vous prenez un CFA, ça va sauver des postes. » Est-ce vrai ?

R : NON. D’abord parce que les heures de CFA ou d’alternance/apprentissage n’entrent pas dans le calcul de la dotation horaire globale (qui est la base de calcul des créations de postes). Ensuite, parce que ces heures peuvent être distribuées en HSE, ou à des vacataires ou à des contractuels, ce qui ne crée pas de poste budgétaire. Et aussi, il faut bien avoir en t^te que si c’est de l’apprentissage/alternance c’est l’entreprise qui se charge de la « formation » professionnelle. Donc il n’y aura pas besoin de beaucoup d’heures de ce côté-là. Et avec le rythme de l’alternance, les besoins en horaires généraux et théoriques sont très réduits. Vous savez compter… Enfin, une section d’apprentissage est volatile ; elle peut rester deux ans et disparaître, on l’a vu souvent.

 

Q : On nous dit : « Si vous prenez un CFA, ça va créer des postes ». Est-ce vrai ?

R : FAUX ! Seuls les élèves du LP entrent dans le calcul des moyens pour les créations de postes. Par contre si l’apprentissage se développait au détriment de la formation initiale (plus de places pour le CFA et réduction pour les CAP-BEP-Bac Pro du LP) on a déjà vu de la sorte des réductions de postes de PLP !

 

Q : On nous dit : « Il existe des besoins en formation dans ce métier et il y aura de la demande, donc ouvrons un CFA dans ce secteur ». N’est-ce pas une vérité ?

R : NON, c’est un argument trompeur. Si c’est vrai et qu’il y a des besoins il faut obtenir du rectorat et de la région qu’ils ouvrent une nouvelle section de CAP, BEP, ou Bac Pro en formation initiale dans le LP. Au moins, les jeunes auront une garantie de formation complète et de qualité ; et ils pourront peut-être même poursuivre d’autres études après.

 

Q : Il paraît que si nous prenions une section d’apprentissage dans le LP nous aurions plus de taxe d’apprentissage pour faire fonctionner le LP ?

R : FAUX ! Vérifiez déjà ce qu’il se passe actuellement. Est-ce que toutes les entreprises qui « acceptent » nos élèves de CAP, BEP, Bac Pro en stage, PFE… versent toutes la TA au LP ? Est-ce que toutes les entreprises où le LP fait ses achats versent leur TA au LP (même EDF/GDF, France Télécom, la Poste, IBM… ?). La réponse est évidemment non pour la totalité. Alors par quel miracle en serait-il autrement ? Ne croyez donc pas cet argument qui n’a jamais été vérifié. Le chef d’établissement est-il prêt à dire aux entreprises qui « acceptent » les élèves du LP en stage qu’elles ne seront plus bénéficiaires de ces jeunes si la TA n’est pas versée au LP ?

 

Q : Peut-on savoir ce que coûte l’apprentissage ?

R : Quel Ministre courageux voudra bien dire ce que coûte réellement à court et à long terme l’apprentissage (exonérations patronales, coût pour la sécurité sociale, détaxes, primes, contrôle des coûts des CFA où…on paye même des démarcheurs pour récupérer de la Taxe !) ? L’opacité reste de mise pour ce budget !

 

Q : Est-ce pareil pour la Taxe d’Apprentissage ?

R : OUI ! Où peut-on voir la réalité du chiffre ? C’est un secret bien gardé que de nombreux ministres successifs n’ont pas réussi à élucider, ou n’ont pas voulu dévoiler. Les différences de collecte entre le public et le privé pour une même formation sont extraordinaires : parfois le décuple au détriment des LP Publics ! Et selon les niveaux de formation, on se demande bien ce qu’ils peuvent faire de cette manne ? Et quand on sait que même des partis politiques peuvent toucher de la Taxe d’apprentissage pour… leur appareil de formation ! Et quand on sait que des organismes collecteurs font travailler (pour eux) la collecte de ces fonds, on n’a plus de doute sur les…écuries d’Augias.

 

Q : Que répondre quand on nous dit : « Mais l’apprentissage/alternance c’est aussi une formation initiale » ?

R : FAUX ! Quand on est « sous contrat de travail », même de « type particulier », on n’est plus dans l’enseignement initial ! Un élève n’est pas un apprenti. Les années d’apprentissage comptent pour la retraite, pas les années d’élève ! La Loi précisait qu’ « aucun jeune ne doit sortir du système scolaire sans avoir obtenu au moins le niveau V », elle n’est dons pas respectée. Nous devons donc refuser toute autre solution que celle qui consiste à obtenir d’abord au moins un CAP ou un BEP avant de sortir de l’école.

 

Q : Est-ce qu’on peut toucher à mes 18h hebdomadaires si j’exerce en apprentissage ?

R : OUI. L’horaire hebdomadaire des PLP est lié à l’enseignement en formation initiale. Dès lors que vous vous retrouvez hors du cadre statutaire vous devez accepter les contraintes. Par exemple en GRETA c’est 647h globalisées sur l’année, alors en CFA…

 

Q : Certains disent que « l’alternance sous statut scolaire c’est mieux parce qu’au moins l’Etat contrôle ». Est-ce vrai ?

R : NON. Le problème du contrôle n’est pas un argument sérieux. Actuellement, les SAIA (services académiques de l’inspection de l’apprentissage), les Régions, les Chambres de Commerce, les Chambres des Métiers sont déjà chargés de ces contrôles de l’apprentissage. Et il n’y a aucun contrôle nouveau si ces sections sont en LP ! C’est une expression mensongère qui cherche à faire accepter l’inacceptable !

 

Q : Qu’est-ce qu’on craindrait si toute la formation était mise en alternance/apprentissage ?

R : Ce serait alors la privatisation d’une partie de l’école publique et laïque. Les jeunes pour lesquels le LP, SEGPA, EREA sont une autre voie de la réussite seraient pour un grand nombre d’entre eux laissés pour compte. Vous connaissez déjà les difficultés que nous  rencontrons pour « placer les élèves en stage ». Vous savez que nombre d’entreprises refusent. Et qu’elles refuseront tout autant de « prendre » «certains jeunes » en alternance/ apprentissage puisqu’elles les refusent déjà ! Et pour les personnels ce sera la privatisation aussi, la fin du statut de fonctionnaire de l’Education Nationale. N’en doutez pas !

 

Q : L’entreprise ne « prend »-elle pas des apprentis pour les former et les embaucher ?

R : Vérifiez chez votre coiffeur et vous serez édifié(e). Pourquoi un tel défilé d’apprenti(e)s et pas d’embauche à la sortie ?

   La réponse est évidemment NON ! Ou alors ça se saurait ! En fait, « utiliser » un(e) apprenti(e)  c’est rentable ! Cela permet des exonérations de charges sociales sur les salaires, de se dispenser de verser des taxes sur la formation, la TA, de recevoir des aides financières conséquentes. Mais l’entreprise n’a aucune obligation de « faire réussir » l’apprenti(e) ou de l’embaucher ! L’apprentissage, c’est pro…fiter des jeunes !

 

Q : L’apprentissage étant un « contrat de travail de type particulier », n’y a-t-il pas de garantie que le « maître d’apprentissage » sera un bon formateur ?

R : NON. Le brevet de maîtrise est facilement attribué. Rien n’est contraignant. L’entreprise peut « prendre » un ou même dix apprentis, et même sur plusieurs sites. Rien n’oblige le « maître d’apprentissage » à être là en même temps que l’apprenti(e). Rien ne lui interdit de «  prendre » d’autres apprenti(e)s si les échecs à l’examen existent en permanence. En fait, il ne craint que l’inspecteur du travail pour « manquements graves » au Code du travail : hygiène, sécurité, dépassement horaire. Il n’est même pas rare qu’il interdise à l’apprenti(e) d’aller au CFA pour des besoins urgents de production !

 

Q : L’école doit-elle « s’occuper de la formation professionnelle » ?

R : OUI. Sous réserve d’une profonde révolution des entreprises en France, et nous n’en sommes pas à la veille, nous pouvons être fiers de poursuivre notre tâche d’enseignants, d’éducateurs et de formateurs. La dimension formation initiale et formation continue des salariés n’est pas encore une action cotée à la bourse des patrons qui misent plus facilement sur la précarité et la déréglementation que sur les qualifications.

 

Q : Il paraît que : « L’école forme des chômeurs ». Vous ne le pensez pas un peu ?

R : NON. Mais alors pas du tout. Sauf pour ceux qui pensent que le marché de l’éducation est « juteux », qui peut avancer de telles inepties ? Il y a confusion ! L’école ne crée pas d’emploi, elle participe à la formation générale, théorique et professionnelle du jeune pour favoriser son insertion professionnelle et sociale. Mais cette insertion sociale sera réussie s’il y a un emploi au bout. Et un emploi ou un autre emploi pour longtemps car le jeune qui débute son activité professionnelle en 2005 devra travailler jusqu’en 2045 ou plus ! Il est donc indispensable qu’il ait les meilleures bases possibles. L’école peut y pourvoir. Mais croyez-vous que l’entreprise héritée de Papa qui « prend » un ou des apprentis aujourd’hui a mis cet horizon 2O45 en perspective ? OUI,…dans son tiroir-caisse aujourd’hui !

 

Q : On nous dit que : « l’apprentissage augmente ». Ce ne serait pas contradictoire avec votre vision des choses ?

R : NON. D’abord, globalement c’est faux, c’est sa nature à des niveaux plus élevés qui augmente. Nous avons toujours eu comme position laïque au SNETAA EIL de n’abandonner aucun jeune en chemin. Et quand des Ministres parlaient de 80% d’une classe d’âge au niveau du Bac, nous nous sommes toujours souciés des 20% manquants dont personne ne parlait. Et lorsque l’on a entendu parler des « deuxièmes chances » ou de « la formation tout au long de la vie » on a apprécié mais continué à revendiquer d’abord une vraie première qualification, la vraie première chance pour la suite pour que tous les jeunes soient pris en compte.

 

Q : Pourquoi êtes-vous contre l’apprentissage/alternance ?

R : Parce que je suis laïque et humaniste, et que je pense que l’Ecole est mieux à même de réussir, parce que c’est son rôle, de former à la fois l’homme – le citoyen – le travailleur et pas simplement l’outil de travail ou le répétiteur du geste.

Parce que je préfère que TOUT jeune puisse d’abord bénéficier d’une bonne formation générale, de son libre arbitre, d’une bonne formation professionnelle initiale et d’une qualification qui peuvent être des passeports pour l’insertion, l’emploi ou des poursuites d’études et des compléments de formations. L’apprentissage n’offre pas ces garanties à tous. Et sérieusement, vous croyez que le souci premier des entreprises n’est pas le chiffre d’affaires mais le bonheur du jeune, la recherche de sa réussite, de sa formation, de sa qualification, de sa promotion future ? J’ai comme un gros doute, pas vous ? 

   


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